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Histoire

Artiste : Frédéric Clanet

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« Le Moyen Âge commence avec la chrétienté. Les premiers évêques avaient assuré la survie de l’Empire romain… et celle de ses vignobles. » dit Didier Nourrisson
En effet, une part de l’histoire de la viticulture en Occident est liée à la chrétienté qui fait du vin la boisson par excellence : Il est essentiel à la célébration de la messe, à l’accueil des visiteurs dans les abbayes et aux soins des malades dans les hospitalités. Lors de l’effondrement de l’empire au V° siècle, après les grandes invasions barbares qui ont ruiné l’immense vignoble romain, les évêques aux nombreuses seigneuries foncières ainsi que les moines aux multiples abbayes ont joué un grand rôle dans l’expansion et le perfectionnement de la viticulture.
Lorsque la règle de saint Benoît (V° siècle) basée sur la maxime « Ora et Labora » (Prie et travaille) est rénovée par Saint Bernard de Clairvaux (XII° siècle), les moines deviennent les principaux producteurs de vins. Ils possèdent une main d’œuvre non négligeable ainsi que des pressoirs, des celliers, des caves. Ils connaissent les terroirs, les cépages et les techniques de rendement.

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Le vignoble bordelais a bénéficié de l’effort général de la mise en valeur :  non seulement ses noyaux originels ont été vinifiés, mais il a aussi conquis de nouveaux terroirs. AU XII°, c’est dans la ville et surtout dans ses faubourgs qu’il connait sa plus grande extension. Ainsi, les murs de la vieille cité abritent des petites parcelles de vigne cultivée en « rège » ou en treille. Hors les murs, le vignoble a gagné la croupe de grave et ne délaisse que les zones humides et marécageuses…

     +  Au XIII°, en Bas-Médoc, ce sont les abbayes de Vertheuil et de Sainte Croix qui ont suscité l’implantation de la vigne ; mais ces premiers essais sont ponctuels. Le Médoc central, aujourd’hui si renommé pour ses crus, ne présente alors qu’un paysage austère de terres et de landes.
    +  En Entre-deux-Mers, l’abbaye de la Sauve-Majeure a introduit la vigne dans de nombreux lieux. A la lecture de son cartulaire, il apparaît qu’aux alentour de 1150, il n’est pratiquement pas de paroisses de l’Entre-deux-Mers qui n’aient pas de vignoble.
    +  La perte des archives de la collégiale de Saint-Emilion empêche toute reconstitution du paysage. Les vins de Saint-Emilion seront pourtant, au XIII°, les seuls à figurer en bonne place dans le célèbre poème de la « Bataille des vins ».

Histoire des plaques
Le mini Grand tour

La proposition était d’évoquer, sous la forme d’un hommage, les lieux et les hommes d'église du Diocèse de Bordeaux qui nous ont  transmis la culture du vin au travers des siècles lointains et perturbés que furent les XIème et XIIème siècles de notre ère.

Ce serait un hommage artistique, ancré dans une solide recherche historique.

Il fallu alors avant tout dresser un inventaire des édifices religieux, abbayes, églises, présents au Haut Moyen-âge et s’assurer de leur activité viticole à l’époque concernée.
Or, s’il n’y a pas de document, écrit ou cartographique qui ait fait ce recensement, il existe cependant de nombreuses traces écrites du commerce relatives au vin. Dans les comptes rendus d’activités diocésaines, ici on précise une quantité fabriquée, ici une autre transportée, ou encore achetée, ou vendue ; témoignages précieux relatés dans les comptes.
Comme toujours, il suffisait de suivre les écrits.

Quand le résultat de cette recherche nous a permis de dresser une liste, nous y avons choisi quelques sites, et je repartis pour un mini Grand tour, accumulant croquis et notes dans des carnets comme au XVIIIème siècle… et prenant quelques photos aussi. Difficile d’échapper à son époque.

L’histoire du vin et de l’église dans notre diocèse est encore bien visible. Dessinée, peinte, surtout sculptée dans la pierre de nos églises qui atteste du lien étroit qu’elles ont entretenu avec la vigne.
Il suffit de lever les yeux vers les discrets modillons, vers les bas-reliefs complexes nichés dans les arcatures, vers les chapiteaux ouvragés des colonnes, pour y trouver une feuille de vigne, une grappe… un vigneron au travail et même une grive picorant des raisins.
Ainsi, chemin faisant, entre livres et paysages, entre bibliothèques, églises et abbayes, de Bazas à Soulac et du Nord au Sud, je me suis imprégné des représentations figurées du haut moyen âge et composé ainsi un registre formel où j’ai pu puiser une inspiration vériste, au sens d’historiquement et plastiquement juste.
Cheminant, visitant, nourrissant mon imaginaire… et mes papilles, — c’eût quand même été dommage — avant de rentrer dans l'atelier.    



La trace et le vide

Ce registre plastique et technique forma une petite épistémé qui me donna un œil enfin médiéval ; une manière de lire, et de décrire le monde dans une forme narrative symboliste, cherchant le punctum dans chaque sujet.
Et c'est par ce prisme que j'ai redonné corps à cette mémoire de pierre, composant en fonction des lieux, des personnages, et de leur histoire des tableaux dans lesquels j'ai laissé se marier naturellement l'imagerie médiévale et ma dilection naturelle pour l'esthétique Art-déco.

Dans la poiétique, cela se traduit par un choix limité de quelques principes de fabrication et de création, par l’élaboration d’une typologie stable de formes symboliques communes à tous les dessins.

Les œuvres sources sont toutes encrées, gravées ou sculptées ; elles sont donc le résultat d’un geste unique et fini. Afin d’être fidèle à l’esprit des formes,  j’ai respecté la contrainte de dessiner toujours à main levée, directement à la mine, la pierre noire ou à l’encre, m’interdisant repentis, retours, ou rectifications.

Là il a été convenu de réaliser cet hommage sous la forme de plaques thématiques, à la manière d’ ex-votto qui garniront les piliers carrés de la nef.
Ainsi, au final, les formes naîtront par la trace gravée ou par le vide, car tout sera réalisé en gravure et découpe de laiton, matière noble qui promènera la lumière le long de la nef..  

Dans un lointain écho de la tradition médiévale les tâches seront réparties dans des ateliers, en l'occurrence ceux de Lorton, à Pessac ; sous la férule des spécialistes les lasers et les fraises feront office de ferronnerie
Avant cela, afin que ces petits tableaux puissent être interprétés par les hommes et les machines, il faudra procéder à leur  transformation fidèle,, avec une précision de quelques pixels, en dessins vectoriel. C’est une technique de dessin point par point, le tracé s’élaborant click par click, comme coup par coup. Ainsi le sujet apparaît  progressivement, la forme ne prenant corps qu’en toute fin, presque d’un seul coup, lorsqu’on ferme le contour et qu’on prend le recul nécessaire (en dézoomant).
Etrangement, cette technique s’est révélée d’une nature très rudimentaire, car la forme n'apparaît qu'au prix de centaines de points, cliqués obsessionnellement,  l’un après l’autre, à la façon rythmique de petits coups de burin sur la pierre. (Il est bien-sûr possible de procéder à une vectorisation automatique des croquis, mais ce n'est pas notre sujet.)

 
 

Dessins vectorisés

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